
Combiner développement économique et transition écologique : telle est l’ambition du Conseil régional avec l’adoption d’une stratégie fret qui met l’accent sur le report modal et la multimodalité.
Rénover et développer les infrastructures de fret, conduire une politique foncière maîtrisée, accompagner la transition énergétique et la décarbonation, former aux métiers du fret et de la logistique, structurer un réseau régional pour une meilleure connaissance des flux de marchandises : voici les principales orientations de la Stratégie fret et logistique pour 2025-2030 adoptée le 16 octobre 2025 par la Région Grand Est.
« Cette stratégie découle de la feuille de route issue de la Conférence régionale du fret et de la logistique et présentée en septembre 2023, explique Thibaud Philipps, vice-président du Conseil régional du Grand Est en charge des transports. Nous avons cherché à la mettre en œuvre en prenant de façon volontariste cette compétence fret. D’ailleurs, nous avions insisté pour avoir un chapitre dédié au transport de marchandises dans le Contrat de plan État-Région (CPER). »
Rénover les lignes capillaires fret qui en ont besoin
La stratégie fret 2025-2030 mobilise donc les moyens financiers inscrits au CPER 2023-2027. Celui-ci prévoit notamment des investissements très importants dans les infrastructures ferroviaires de l’ordre de 1,4 milliards d’euros, bénéficiant aussi bien aux voyageurs qu’au fret et comprenant à la fois la modernisation du réseau structurant et celle des lignes capillaires assurant la desserte fine des territoires.
En matière de ferroviaire, la stratégie régionale du fret et de la logistique vise, en particulier, la régénération de 12 lignes capillaires fret d’ici 2028. Elle intègre également une étude d’opportunité et de faisabilité de la réouverture au fret de la ligne Rambervillers-Bruyères, située dans les Vosges et sans trafic depuis près de 40 ans.
Les autres modes de transport sont, pour autant, loin d’être oubliés avec 330 millions d’euros pour le réseau routier structurant et près de 210 millions d’euros pour le fluvial et le portuaire. Mais au-delà des investissements dans les différents types d’infrastructures, c’est aussi la complémentarité des modes de transport qui importe et qui est encouragée avec un soutien particulier aux plateformes multimodales et autres points d’accès aux réseaux de transports massifiés.
Soutenir la multimodalité et le verdissement du transport routier
« La priorité sera donnée à une plateforme multimodale à Vatry, qui est absolument indispensable dans le cadre de la stratégie de transport aérien, affirme Thibaud Philipps. Ailleurs, nous devons compléter le réseau existant, en s’appuyant par exemple sur la très efficace plateforme de Bettembourg. En Alsace, il peut aussi y avoir des besoins, mais ça doit s’insérer dans l’écosystème portuaire existant et dans les corridors fret. »
L’accélération de la politique de report modal ne signifie pas, pour autant et loin de là, que le transport routier serait absent de la stratégie fret régionale. D’autant plus que la Région Grand Est, depuis le 1ᵉʳ janvier 2025, gère 525 km du réseau routier national. Est ainsi prévu « un soutien ciblé pour aider les transporteurs à anticiper l’écocontribution poids lourds en renouvelant leur parc vers des motorisations moins polluantes. »
Se coordonner avec la Collectivité européenne d’Alsace
La Région, en effet, s’était engagée à mettre en place des mesures de compensation en faveur des transporteurs routiers du Grand Est impactés par l’écocontribution. Elle envisage aussi des mesures similaires pour le R-Pass que la Collectivité européenne d’Alsace (CeA) prévoit de mettre en place.
Les deux collectivités travaillent actuellement pour parvenir à un accord sur ce point, comme l’explique Thibaud Philipps : « Seule la Région peut mettre en place des aides, la CeA n’ayant pas la compétence économique. En échange, la CeA renforcerait sa participation au financement des capillaires fret, qu’elle avait très fortement réduite. Or, il y a justement un enjeu important sur les capillaires fret en Alsace ! »
Financer les embranchements au réseau ferré
Au sujet de ces capillaires fret, qui pourront être financés par une partie du produit de l’écocontribution, la Région a décidé le 14 novembre « d’élargir le dispositif CAPFRET pour pouvoir aussi intervenir sur la partie privée des installations terminales embranchées, annonce Thibaud Philipps. La décision a aussi été prise de pouvoir déroger aux plafonds de financement des capillaires fret fixés dans le cadre de CAPFRET, si cela est nécessaire pour boucler le tour de table. »
Pour développer le nombre d’installations terminales embranchées (ITE), au nombre de 150 dans la région à ce jour, le nouveau dispositif mis en place depuis le 1ᵉʳ décembre est financé à hauteur de 6,6 millions d’euros par l’État et de 4 millions d’euros par la Région. Les subventions, d’un montant pouvant atteindre 1,25 million d’euros pour la création d’une nouvelle ITE et 1 million d’euros pour la rénovation ou la remise en service d’une ITE existante, couvrent jusqu’à 50 % des coûts éligibles.
Investir de manière équilibrée à la fois pour les voyageurs et pour le fret
« L’infrastructure ferroviaire doit être améliorée, avec par exemple la mise au gabarit P400 des tunnels des Vosges, qui font partie des dossiers que l’on essaie de pousser, mais pour lesquels nous dépendons aussi de l’État et de SNCF Réseau, poursuit Thibaud Philipps. Nous voulons montrer à ces partenaires l’intérêt de ces tunnels pour la mise en place d’un vrai corridor fret, et sommes prêts à participer aux travaux y compris sur le réseau structurant et pas seulement sur les capillaires fret. Surtout, nous voulons réaffirmer qu’il n’y a pas d’opposition entre le fret et le transport de voyageurs, et que le fret doit bénéficier d’une infrastructure de qualité et disponible aussi bien de jour que de nuit. » Une affirmation d’autant plus importante que la Région, qui cherche à faire savoir aux milieux économiques qu’elle est à la recherche du juste équilibre, est par ailleurs organisatrice des transports de voyageurs (trains TER Fluo).
Pour servir cette ambition dans le développement des infrastructures ferroviaires, la Région a créé une nouvelle société publique locale (SPL) dont elle est l’actionnaire principal. Baptisée Grand Est Infrastructures, cette SPL doit assurer, à terme, la gestion de 430 km de lignes de desserte fine du territoire à la place de SNCF Réseau, sur les 800 km de petites lignes de la région. La création de quatre nouveaux ateliers de maintenance est aussi au programme. En avril 2022, la Région avait déjà créé avec les mêmes partenaires (les agglomérations de Strasbourg, Metz, Mulhouse et Reims) une SPL, Grand Est Mobilités, pour les procédures de mise en concurrence des TER et la gestion du matériel roulant.









